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Alice Taverne (1904-1969) et le musée de la paysannerie et de l’artisanat forézien

Sujets  : arts et traditions populaires - mœurs et coutumes - métiers - mobilier - outils - médecine populaire - sorcellerie - religion populaire - du berceau à la tombe - fêtes - jeux - littérature orale - collection - muséographie.

Sujets annexes  : archéologie gallo-romaine, notamment le site gallo-romain des Aiguets, à l’est d’Ambierle, où Alice Taverne effectua des fouilles avec son père en 1935.

Sociabilité  : Paul Fortier-Beaulieu (né en 1935), directeur d’une tannerie à Roanne et érudit local, spécialiste des coutumes de mariage, il est l’auteur de l’ouvrage intitulé : Mariages et Noces campagnardes dans les pays ayant formé le département de la Loire : Roannais, Forez, partie du Beaujolais, Jarez..., publié en 1937 à Paris, chez Gustave-Paul Maisonneuve, dans la collection ″Les Littératures populaires de toutes les nations. Nouvelle série. Tome V″. (XV-368p., pl., cartes hors texte, musique). Et fut également l’éditeur scientifique d’Un mariage dans le Haut-Forez en 1873, récit d’un ménétrier de noces [Jean-Baptiste-Toussaint Chavanat], avec 28 dessins originaux en couleurs de Danielle Murgue. (Paris, Blondel La Rougery, 1938, 47p., musique, collection ″Contes des provinces de France″).

BIOGRAPHIE
Alice Taverne est née le 23 mars 1904 à Balbigny (Loire) où son père, Louis Taverne, était employé à la gare. Louis Taverne (1875-1946), né à Ambierle (Loire), avait épousé en 1900 Marie Brélaud, dont les parents étaient meuniers à Saint-Pierre-Laval dans l’Allier où Alice fit de nombreux séjours avec sa mère.
Deux ans après la naissance de sa fille, Louis Taverne obtient un poste à Paris, dans les bureaux des chemins de fer de l’époque. Passionné depuis l’enfance par le vol des oiseaux, et les premiers pas de l’aviation, il fréquente régulièrement le Muséum d’histoire naturelle et adhère au Comité international ornitho-entomologique (CIO-E) dont il devient le secrétaire (il sera l’auteur en 1931 chez Doin, d’une plaquette intitulée : L’aviation naturelle).
En 1930, à l’âge de la retraite, Louis Taverne devenu veuf, revient au pays d’Ambierle accompagné de sa fille unique, Alice. Les Taverne, père et fille s’adonnent alors en un premier temps à des prospections archéologiques, puis, suite à leur rencontre avec Paul Fortier-Beaulieu qui les associe à ses recherches sur les coutumes du mariage en Forez et les introduit dans les milieux folkloristes, ils se livreront à des enquêtes sur les traditions roannaises et foréziennes, selon le modèle ethnographique d’Arnold Van Gennep, collectant au passage meubles, outils et ustensiles, qui très vite viendront encombrer la demeure familiale.
A la mort de son père survenue en 1946, Alice, fidèle à la volonté du défunt, œuvre sans répit à la création d’un ″musée du terroir″, n’hésitant pas à vendre la maison familiale pour pouvoir acquérir une ancienne maison de maître transformée depuis en institution religieuse. Alice achète le corps du bâtiment en 1950, s’y aménage deux sommaires pièces à vivre et travaille sans relâche à la création des salles du futur musée. En 1951, une dizaine de salles sont déjà ébauchées, et c’est en 1952 que le préfet de la Loire, monsieur Dumont, inaugure le ″Musée de la Paysannerie et de l’Artisanat forézien″ qui deviendra le musée Alice Taverne à la mort de sa créatrice.

L’ŒUVRE

Ouvert au public dès 1951, le musée Alice Taverne est la résultante des enquêtes effectuées en Roannais et en Forez par les Taverne, père et fille à partir des années 30, selon les préceptes ethnographiques d’Arnold Van Gennep.
Alice Taverne construisait les salles de son musée à partir d’un thème ou d’un objet autour duquel elle réunissait les éléments adéquats, puisés dans ses collections personnelles. Elle écrivait ensuite les textes explicatifs sur de grandes feuilles de papier à dessin qu’elle affichait sur les murs du musée. Le visiteur pouvait ainsi découvrir la ″maison″ (la salle paysanne avec son âtre central), une salle d’auberge-relais de poste, un atelier de couturière intitulé : ″Chez la Nanette qui était tailleuse à Saint-André″ ; la ″Salle bourgeoise de nos collines″, comme l’avait intitulée Alice ; ″L’Antre du rebouteux″, tapissé d’illustrations extraites de journaux de l’époque (fin XIXe, début XXe), comme cela se faisait souvent dans les intérieurs modestes ; ″Chez la béate″, où se côtoient objets de piété et objets de dentellières... Ou encore ″L’Oratoire″, pour lequel la muséographe avait affiché : « La simplicité rustique de ce petit oratoire nous permet d’exposer les saints protecteurs des vignerons, des tonneliers, des laboureurs et des tisserands... » ; etc.
Ethnographe passionnée du pays forézien, Alice Taverne était particulièrement férue de modes vestimentaires et collectionnait les costumes traditionnels de la fin du XIXe, étendant sa collecte à tout le département actuel de la Loire et cherchant toujours à percer les origines de ces particularismes vestimentaires ainsi que leur symbolique, par-delà leurs fonctions utilitaires.
La ″dame du musée″, comme on l’appelait alors, collecta ainsi patiemment une quarantaine de costumes avec leurs accessoires, qu’il s’agisse de costumes de bergère ou de tenues de paysanne aisée, vêtements journaliers ou de fête, et plus de deux cents coiffes et pièces de broderies et dentelles.
Des années cinquante jusqu’à sa mort, Alice Taverne exposera sa précieuse collection dans les quatre premières salles en rez-de-chaussée du musée, n’hésitant pas à l’occasion à porter, ou faire porter par une amie, un costume mis au jour.

Travaux et publications :

Contes et récits d’Ambierle [1986] / recueillis par Louis et Alice Taverne. Ambierle, Centre de recherches ethnologiques du Musée Alice Taverne, 23p. (Etudes et documents ; 12). [Textes en patois d’Ambierle avec traduction française en regard].

TAVERNE Alice et Louis, 1935. ″Les animaux dans les traditions populaires du Forez″, Revue de Folklore français, tome 6, n° 6, p. 253-270.

TAVERNE Alice et Louis, 1942. ″Les vendanges en Roannais en 1939″, Revue de Folklore français, tome 13, n° 3, p. 97-105.

TAVERNE Alice, [1971-1974]. Coutumes et superstitions foréziennes. [Publication posthume, textes établis par Robert BOUILLER, Ambierle, Editions du Musée forézien-Alice Taverne, 6 fasc., 380p.] :
Fasc. 1-2 : ″Introduction générale. L’Habitat : aspects de la vie quotidienne″, 1973, 71p. (ill.)
Fasc. 3 : ″Le Costume″, 1973, 47p. (dessins de Paulette Crétoux).
Fasc. 4 : ″Les Etapes de la vie : enfance, mariage, décès″, 1972, 79p. (ill.)
Fasc. 5 : ″Médecine populaire, sorcellerie, diable et lutins″, 1971, 64p.
Fasc. 6-7 : ″La Nature. Traditions agricoles″, 1974, 52p.
Fasc. 8-9 : ″Traditions artisanales. Jeux et fêtes″, 1974, 61p. (musique)

TAVERNE Alice, [1976]. Médecine populaire et sorcellerie en Roannais et Forez : enquêtes d’Alice Taverne, complétées et collationnées par Robert Bouiller. Ambierle, Editions du Musée forézien, 46p. (Cahiers du Musée forézien ; 3). [Extrait des Coutumes et superstitions foréziennes].

LE FONDS TAVERNE

Les archives d’Alice Taverne (en partie publiées par Robert Bouiller) se trouvent au musée Alice Taverne d’Ambierle.

Pour en savoir plus...

Articles et notices ethnographiques de Louis et Alice Taverne. Ambierle, Centre de recherches ethnologiques du Musée Alice Taverne, 2002, 79p. (Etudes et documents ; 43).[Recueil d’articles publiés entre 1935 et 1986].

BOUILLER Robert, 1992. Une vie, un musée : commentaires et réflexions sur l’œuvre d’Alice Taverne. Ambierle, Centre de recherches ethnologiques du Musée Alice Taverne, 43p. (Etudes et documents ; 30).

BOUILLER Robert, 1999. D’un Noël à l’autre ; fêtes et coutumes calendaires dans le département de la Loire. Ambierle, Centre de recherches ethnologiques du Musée Alice Taverne, 156p., (Etudes et documents ; hors série n° 6).

Le Musée Alice Taverne. Reflets du monde rural / Texte de Robert BOUILLER. Romagnat (63), Editions De Borée, 2003, 108p.



Auteur
Florence Galli-Dupis
Ingénieur d’études CNRS
Lahic/IIAC (UMR 8177)
Archivethno France
2006


En quelques mots...
Archéologue amateur puis ethnographe des pays roannais et forézien, Alice Taverne a consacré sa vie à la collecte et sauvegarde des arts et traditions populaires du pays natal de son père. Sa passion trouvera son aboutissement dans la création du musée de la Paysannerie et de l’Artisanat foréziens inauguré en 1952, devenu depuis le musée Alice Taverne, singulier témoignage d’un monde rural à la fin XIXe siècle.
Le musée Alice Taverne est situé à 18 km de Roanne, à Ambierle (région Rhône-Alpes, département de la Loire (42), canton de Saint-Haon-le-Châtel).


Documents visuels :