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Les derniers meuniers à vent et à farine en Lauragais de 1870 à 1950.

Si les « anciens » qui habitaient le Lauragais il y a un siècle pouvaient revenir se promener dans nos campagnes, sans doute seraient-ils particulièrement choqués par la disparition, sur les collines autour des villages, des ailes blanches inséparables pour eux de leur paysage coutumier.

En effet, à cette époque, plus de deux cents moulins en activité animaient le paysage du lent tournoiement de leurs ailes. Deux cents moulins, il fallait bien cela pour nourrir hommes et bêtes. Sans eux, comment se serait-on procuré la farine de blé pour la confection du « pa de borio » fait chaque semaine à la maison, la farine de maïs pour le millas d’hiver, le son, la repasse, les farines de céréales secondaires pour la pâtée des animaux ?

« Le meunier, assure un ancien client, c’est bien simple : on ne pouvait pas se passer de lui ! » Cet homme indispensable, paysan par son entourage, mais aussi artisan nanti d’un outil grandiose, commerçant par son activité, était un personnage à part, dont la singularité se manifestait dans le costume : s’il portait une blouse, elle était blanche, ce qui le faisait repérer aussitôt dans les assemblées parmi les blouses noires ou bleues, tenue traditionnelle des paysans.

Cette différence, les meuniers tenaient à la préserver, pratiquant une endogamie qui les élevait au rang de caste, avec des coutumes, des façons de vivre leur assurant une place particulière dans la société rurale. Pourtant le monde moderne ne se souvient d’eux qu’au détour d’une chanson ou la vue d’un déguisement folklorique.

Qui étaient donc ces meuniers, que les chansons et les contes prétendent tour à tour fainéants, voleurs ou coureur de jupons ? Quelle était leur place dans la société rurale du début du siècle ? Qu’est-ce qui, indépendamment de leur rôle économique, les rendait aussi importants pour les habitants des villages et des fermes ?


Par Huguette et Jean Bézian,
le 24 avril 1998,
au GARAE.