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Auprès de mon arbre... Regard anthropologique sur la passion généalogique.

« Les généalogistes, pour moi, c’est des extraterrestres § » Que ces explorateurs au long cours sillonnant les veines du temps nous étonnent ou nous agacent, en tous les cas ils nous intriguent suffisamment pour que chacun - et le généalogiste lui-même - y aille de son hypothèse et tente de s’expliquer l’intensité et l’importance sans précédent de leur passion. En règle générale, c’est en terme de rupture que les uns et les autres envisagent le phénomène. La mobilité sociale et géographique qui caractérise les classes moyennes depuis une trentaine d’années, le passage d’une société paysanne à une société urbaine, l’instabilité des familles secouées par les divorces et les recompositions constituent autant de réponses que n’autorisent pourtant pas le parcours des généalogistes rencontrés par Sylvie Sagnes au sein d’Histoire et Généalogie en Minervois ou du cercle généalogique du Languedoc.

Aussi une lecture moins réductrice du phénomène appelle-t-elle une approche davantage focalisée sur ‘œuvre généalogique, le discours qui l’entoure et l’utilisation qui en est faite, que sur le profil sociologique et familial de son auteur. De la sorte peut être mise au jour l’intention profondément paradoxale qui sous-tend cette quête identitaire, à savoir une conscience héréditaire singulièrement exacerbée en même temps que trahie par une attitude résolument sélective et égocentrée. Autobiographie par procuration, la pratique généalogique apparaît dès lors aux antipodes de toutes formes de nostalgies et de réactionnismes avec lesquelles on a pu la confondre, et finit même par ressembler de façon troublante à ces nouvelles parentés (recompositions, adoption, ...) que l’on sait motivées par le même souci d’affirmation de soi et régies par l’élection, au mépris de la préséance du sang.


Par Sylvie Sagnes,
le 16 mai 1997,
au GARAE.